Décès d'Antoinette Fouque, une figure historique du féminismeMilitante historique du féminisme français, Antoinette Fouque, co-fondatrice du Mouvement de libération des femmes (MLF), est décédée dans la nuit de mercredi à jeudi à Paris à l'âge de 77 ans, ont annoncé vendredi soir "ses amies du MLF".
"Une grande figure du féminime s'est éteinte", a déploré samedi le président François Hollande dans un hommage à cette "inlassable militante (qui) n'a jamais cessé de défendre l'émancipation des femmes".
"Elle a porté ses convictions en Europe et dans le Monde", a poursuivi le chef de l'Etat dans un communiqué.
Antoinette Fouque avait cofondé le MLF avec Monique Wittig et Josiane Chanel, un événement qu'elle faisait remonter à une soirée d'octobre 1968, dans la foulée de Mai 68, "en réaction contre le virilisme du mouvement étudiant" et qui avait constitué pour elle "une libération joyeuse", avait-elle expliqué dans un entretien au site internet Au Féminin. Une date et un rôle parfois contestés par d'autres historiques du féminisme pour lesquelles le Mouvement a véritablement pris corps en août 1970.
Créatrice et directrice des éditions des Femmes (1973), Antoinette Fouque fut l'animatrice du groupe "Psychanalyse et Politique", l'un des courants majeurs du féminisme en France.
Née Grugnardi, le 1er octobre 1936 à Marseille, Antoinette Fouque, diplômée d'études supérieures de lettres et docteur en sciences politiques, fut d'abord enseignante (1961), et parallèlement, à partir de 1964, critique littéraire et traductrice, notamment aux Cahiers du Sud et à La Quinzaine littéraire.
Au sein du MLF, cette ancienne étudiante de Roland Barthes, qui suivit une psychanalyse avec Jacques Lacan, fonde et anime le groupe "Psychanalyse et Politique".
Dans la foulée de la création des éditions des Femmes, elle ouvre trois librairies "Des Femmes" à Paris, Lyon et Marseille, dirige Le Quotidien des femmes (1974), puis Femmes en mouvement (1978-1982), et inaugure la Bibliothèque des voix, composée de livres-cassettes.
Antoinette Fouque préside l'Alliance française de San Diego aux Etats-Unis (1986-1988), avant de fonder en 1989 L'Alliance des femmes pour la démocratie, dont elle sera présidente.
Dans les années 90, cette théoricienne du féminisme, aux positions parfois controversées, s'engage nettement sur le terrain politique.
Chargée de mission auprès de Michèle André, secrétaire d'Etat aux Droits des femmes en 1990, elle fonde deux ans plus tard le club Parité 2000, avant d'être élue au Parlement européen en 1994 (jusqu'en 1999), sur la liste "Energie radicale" de Bernard Tapie.
A Strasbourg, elle sera vice-présidente de la commission des Droits de la femme, et déléguée de l'UE à la conférence mondiale des femmes à Pékin en 1995.
Parallèlement, elle est chargée de séminaires en sciences politiques et directrice de recherches à l'université de Paris-VIII Saint-Denis.
- 'Une grande et belle voix s'est tue' -
Commandeur de la Légion d'honneur, grand officier de l'ordre national du Mérite, commandeur des Arts et des Lettres, Antoinette Fouque avait publié "Il y a deux sexes" (1995, réédité en 2004) et en novembre dernier, était sorti, sous sa direction, le "Dictionnaire universel des créatrices".
L'annonce de sa disparition a immédiatement suscité un flot de réactions sur les réseaux sociaux, d'anonymes comme de personnalités.
Dans un communiqué la ministre des Droits des femmes Najat Vallaud-Belkacem a évoqué "une grande perte".
"Une grande et belle voix du féminisme s'est tue", a regretté la ministre rappelant sa contribution, "immense", "à l'émancipation d'une génération de Françaises". Elle "continuera d'inspirer longtemps celles et ceux qui s'engagent pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes", a-t-elle poursuivi.
Pour la ministre de la Culture, Aurélie Filippetti, cette "militante inlassable de la +féminologie+, psychanalyste, députée européenne (...) fut aussi une figure culturelle majeure".
Sur twitter, la ministre du Logement Cécile Duflot a salué '"une femme de combats".
Un hommage à celle qui citait la naissance de sa fille comme "le moment le plus heureux de sa vie" et ne voulait pas opposer maternité et libération.
Sur ce réseau social, un des premiers hommes à s'exprimer a été le président de l'Assemblée nationale Claude Bartolone qui a souhaité lui rendre un sobre "hommage".