Alcoolisme : les effets indésirables du baclofène sont en augmentation
Le nombre d’effets indésirables provoqués par le baclofène, médicament utilisé contre l’alcoolisme, est en progression. Selon un rapport mis en ligne par l’Agence nationale du médicament et des produits de santé (ANSM), 405 effets indésirables ont été recensés en 2012, soit 163 de plus qu’en 2011. Dans le même temps, le nombre de comprimés de baclofène vendus a progressé de 52 %.
Depuis 2008, un usage grandissant hors AMM du baclofène dans le traitement de l'addiction à l'alcool est enregistré en France.
Selon le compte rendu du suivi national du Comité technique de pharmacovigilance (CTV) du 16 avril 2013 que l’ANSM vient de publier, "la proportion de l’usage hors AMM (autorisation de mise sur le marché) dans le traitement de l’alcoolo-dépendance correspondrait à environ 50 % des ventes de baclofène sur le territoire national en 2012".
Des effets indésirables de gravité variable, déjà connus, notamment neuropsychiatriques
Le rapport précise qu’en 2012, 263 cas (dont 93 graves et 170 non graves), correspondant à 405 effets indésirables ont été rapportés dans le traitement des addictions et que "cette augmentation peut s’expliquer par une moindre sous-notification et/ou une augmentation de la fréquence de survenue des effets indésirables".
Les effets indésirables les plus fréquents sont des troubles neurologiques (33,6 %), psychiatriques (21,2 %) et gastro-intestinaux (10,1 %). Ces effets indésirables sont en nette progression et leur nombre est supérieur aux effets attendus, par rapport à l’augmentation des ventes de baclofène. Ainsi, alors que les ventes du produit ont été multipliées par 1,5, les effets indésirables neurologiques et en particulier les troubles de la conscience ont été multipliés par 7, tandis que les troubles psychiatriques ont été multipliés par 8 à 10 (troubles dépressifs, syndromes de sevrage, abus et dépendances). Par ailleurs, certains effets indésirables semblent limitant pour le traitement, comme la décompensation maniaque, la dépression, le risque suicidaire, le risque convulsif et toutes les formes d’abus.
Et des nouveaux effets indésirables, inconnus jusqu’alors
Des nouveaux effets, jamais rapportés auparavant, ont également été enregistrés. Parmi eux, des troubles sensitifs et sensoriels, des cas de sécheresse de bouche, d’insomnie, de décompensation maniaque, d’accidents, de syndromes de sevrage avec hallucinations et confusion, de sudation excessive, d’oedèmes. D’autres signes moins fréquents mais tout aussi nouveaux ont été signalés, comme des augmentations des triglycérides, prise de poids, troubles de la vue, ou syndrome d’apnée du sommeil.
Pour le rapporteur, ces nouveaux signaux "témoignent du profil d’effets indésirables différents du baclofène dans le traitement des addictions" mais également du manque de connaissances sur les mécanismes d'action de ce médicament, utilisé à l'origine comme un anti-spastique. Il préconise l’encouragement de la notification spontanée des effets indésirables et la poursuite du programme de pharmacovigilance au niveau national, en y ajoutant que tout traitement doit être décidé au cas par cas et bénéficier d’une surveillance médicale étroite.
Pour le conditionnement, la mise à jour de la notice des caractéristiques du produit est préconisée, en y ajoutant les "nouveaux" effets indésirables et en mettant en garde sur ceux pouvant être graves. Enfin, une prescription centralisée, comme elle est pratiquée à Lille, pourrait limiter la survenue d’effets indésirables graves, précise le rapport.
Jesus Cardenas
Source : Compte rendu de la réunion du Comité technique de pharmacovigilance du 16 avril 2013 - Mis en ligne le 23/8