Lorsque cet organe, témoin de nos émotions et de nos agitations physiques, “bat la chamade”, peut-on s’en réjouir sans crainte ? Ou doit-on garder présent à l’esprit le souvenir de personnages célèbres emportés en pleine action ?
“Aimer à coeur perdu”L’expression “aimer à coeur perdu” témoigne bien d’une peur fréquente : celle que notre organe vital s’emballe un peu trop au cours des relations sexuelles, au point de défaillir.
Lors des ébats en effet, le rythme cardiaque s’accélère et la pression artérielle s’élève pour favoriser le remplissage des corps érectiles, féminins comme masculins. Cela ne risque-t-il pas de “fatiguer” le coeur ?
Le meilleur des exercicesComme tout muscle, en fait, cet organe apprécie l’entraînement. Et, bonne nouvelle, la “gymnastique amoureuse” ne fait pas exception à la règle ! Faire l’amour entraîne notre coeur à l’effort et libère des hormones antistress dans le cerveau, qui contribuent à diminuer la survenue de troubles cardiaques.
Une vaste étude l’a démontré (cohorte de Caterphilly) en constatant que le risque de mortalité est réduit de moitié chez les hommes rapportant au moins deux orgasmes par semaine. On sait également que les couples mariés sont susceptibles d’atteindre un âge plus avancé que les personnes seules. Mais cela n’est-il pas différent quand notre coeur est déjà “usé” par une maladie cardiaque ?
Une activité à risque pour les cardiaques ?Lorsque les artères nourricières du coeur, les coronaires, sont rétrécies par des plaques d’athérome, il est possible, en théorie, que la gymnastique amoureuse excède leur capacité d’apport en oxygène et que le coït déclenche un infarctus. Notre mémoire collective n’a pas oublié la mort subite de personnages célèbres dans de telles circonstances, parce qu’elle a fait scandale : le président Félix Faure, décédé en 1899 dans les bras de sa maîtresse, ou encore le Cardinal Jean Daniélou, retrouvé mort chez une prostituée en 1974. D’où l’appréhension bien légitime de tout un chacun.
Néanmoins, si un gros effort physique peut contribuer à déclencher un accident cardiaque, l’énergie dépensée lors d’un coït n’est pas si importante qu’on se l’imagine. Celle-ci triple seulement par rapport à l’effort minimum d’un sujet assis sans rien faire. Marcher à 6 km/h, poser du papier peint ou laver les vitres entraîne une dépense plus conséquente ! C’est pourquoi, statistiquement, le risque de mort subite lors de rapports sexuels est extrêmement faible : seuls 0 ,9 % des infarctus, survenant essentiellement chez les personnes les plus sédentaires, leur seraient imputables.
L’amour conseillé après un infarctusQue ce soit après une première alerte, lorsque l’on souffre d’angine de poitrine ou que l’on est atteint d’insuffisance cardiaque, les cardiologues recommandent systématiquement un entraînement adapté à l’effort, car celui-ci “entretient la machine”.
La reprise progressive d’une sexualité régulière fait partie de leurs recommandations, au même titre que tout autre activité physique. Pour rassurer leurs patients, les médecins fournissent un repère simple, qui permet d’adapter ses pratiques amoureuses à son état physique : si l’on peut monter un étage sans être essoufflé, faire l’amour est sans danger.
Du moins avec une partenaire habituelle. Après une très longue abstinence (le danger est plus notable lors d’un effort inhabituel) ou avec une nouvelle partenaire (davantage de stress et de souci de performance), mieux vaut compter deux étages.
Et les médicaments ?Ceux contre l’hypertension peuvent influer légèrement sur la sexualité, mais le risque d’être confronté à cet effet secondaire est en réalité extrêmement faible : de 1 à 2 % sous bêta-bloquants, de moins de 10 % sous diurétiques. Plus souvent, ce sont les patients eux-mêmes qui, du fait de leur anxiété, augmentent leur probabilité de voir apparaître un dysfonctionnement sexuel. Reste que, lorsque les artères coronaires sont en mauvais état, les artères génitales sont aussi souvent atteintes, ce qui peut entraîner des difficultés érectiles.
La prescription de pilules aidant à l’érection n’est-elle pas dangereuse pour ces patients ? Des essais très sérieux, menés en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, ont montré que les coronariens qui recouraient à ces médicaments avaient une mortalité égale ou inférieure à ceux qui s’en privaient. A condition que leur état soit stable (pas d’infarctus de moins de six mois), que leur tension ne soit pas inférieure à neuf, et qu’ils n’associent pas les médicaments sexo-actifs avec certains traitements (molsidomine, nicorandil ou dérivés nitrés pris depuis moins de 24 H), qui risquent de trop faire chuter leur tension artérielle.
Les personnes cardiaques se connaissent bien et leur médecin sait les conseiller pour que, comme les autres, elles puissent faire l’amour très longtemps sans courir aucun risque.