Saint-Martin Vésubie: les bergers manifestent contre le loup
En marge d'un symposium "Vivre ensemble avec le loup" organisé à Saint-Martin Vésubie pendant quatre jours, plusieurs dizaines de bergers ont manifesté leur colère face aux dégâts provoqués par le loup.
Une manifestation sans incident mais pour eux cette manifestation est une provocation.
Le site du Mercantour a été volontairement choisi pour profiter du 20ème anniversaire de présence avérée du loup en France afin de dresser un état des lieux à la fois rétrospectif et prospectif, dépassant très largement l’échelle locale.
Pour la première fois, une large confrontation entre acteurs variés (du berger au responsable de l'ONCFS par exemple) et chercheurs (en sciences humaines mais aussi en sciences de la vie) est proposée.
Mais pour les bergers, ce n'est ni le lieu ni le moment au débat. Ils ont installé un barrage filtrant à l'entrée du village ce matin. Une quarantaine de gendarmes mobiles surveillent la manifestation.
"Victoire pour le loup"
Des associations écologistes ont saisi le tribunal administratif de Nice qui a finalement suspendu la semaine dernière ces autorisations, estimant qu'elles n'étaient pas assez encadrées. "Victoire pour le loup !", ont réagi les associations.
Mais mauvaise nouvelle pour l'Etat qui avait choisi cette voie pour pallier les défauts des autres options autorisées, et notamment les "tirs de défense renforcée", grande nouveauté du dernier "plan loup".
Il s'agit, après trois attaques d'un même troupeau, d'autoriser jusqu'à une dizaine de chasseurs à se poster à proximité afin de tuer le prédateur.
"Les éleveurs menacés"
L'idée est notamment "d'éduquer" l'animal, en lui faisant comprendre qu'il prend "un risque en s'approchant du troupeau", explique M. Castaner, député des Alpes de Haute-Provence.
Or, "on voit les limites" de cette méthode, admet-il. "Le loup est un animal malin, super mobile.
On met en place le tir de défense renforcée à proximité du troupeau, deux heures après il est ailleurs, et le lendemain, l'attaque se produit à trois kilomètres de là", explique-t-il, même s'il appelle à donner du temps à la méthode pour qu'elle s'améliore et monte en puissance.
L'autre grande option reste le "tir de prélèvement", opération lourde et "extrêmement coûteuse"? selon M. Castaner, qui mobilise une compagnie de louveterie ou des fonctionnaires de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONFCS) pendant plusieurs jours, à la recherche d'une meute, et qui finit par tuer un loup sans lien avec une attaque.
Un plan loup inadapté
De leur côté, à bout, les éleveurs dénoncent un plan loup "inadapté". "Si le loup n'est plus une espèce en danger, les éleveurs de nos montagnes sont menacés", assurent ceux de la région PACA qui veulent que les loups soient régulés par meute ou encore que les tirs de défense soient autorisés au coeur des parcs naturels nationaux.
LE LOUP DANS LE VENTOUX
Nicolas Ughetto, un sympathisant de FERUS, après de longues heures de traque, a finalement réussi à le prendre en photo, le 17 février dernier.
Il nous livre ici son ressenti ainsi que la photo tant espérée, en exclusivité.
Enfin, nos regards se sont croisés !
Dimanche 17 février 2013, petit matin, ciel pur, pas de vent.
Je décide de ne pas monter le 500 mm sur mon boîtier et de ne prendre que le 100–400 mm.
Cela fait une semaine qu’il a neigé, il en reste 10 à 15 cm, gelés ; ce matin il fait moins 9° C.
Ma seconde fille, Jeanne, sœur de Lou, a ouvert les yeux au monde il y a 2 jours à peine.
Je suis ce matin dans l’autre maternité du monde, le Mont Ventoux et je vais moi aussi essayer d’ouvrir grand les yeux.
Aimera-t-elle, aussi, ce territoire et ces matins de quête? L’arpentera-t-elle avec moi, à la recherche du monde sauvage ? Qu’en restera-t-il quand elle aura mon âge ?…
Cet air froid qui me brûle les poumons et m’engourdit les doigts depuis près d’une heure déjà m’oblige, un moment, à m’arrêter pour reprendre mon souffle.
La neige me porte et pétille sous mes pas. C’est mon champagne à moi pour fêter sa naissance.
Il est bientôt 7 h 30, je suis dans mon élément. Non, si c’était le sien…
Soudain, trop tard ! Il m’a vu avant que je ne le vois. Il était là entre les truffiers et les lavandes givrées : enfin j’en croise un !
Pourtant, jusqu’ici des loups j’en ai vu beaucoup.
Toute ma vie, j’ai vu des loups. Imaginaires, dans les contes d’enfants, racontés par mes parents.
Les autres étaient des loups que j’ai longtemps mais en vain espérés et que jusqu’ici j’avais poursuivis sans réussite.
Pas le temps de se risquer à un réglage ou à un changement d’objectif. Toutes mes photos seront floues, il me fuit en courant à grande vitesse, il est déjà à 80 mètres de moi… Faut-il que je le siffle, que je crie, pour, un instant, le figer de surprise et pouvoir œuvrer à dessein…
Non, je décide de laisser faire le hasard mais surtout la nature. A 90 mètres, il s’immobilise 3 courtes secondes : je croise alors, furtivement, son regard. Quels bonheurs ! C’est mon jour de chance, je peux enfin espérer avoir une photo correcte.
Il reprend alors sa course que j’accompagne avec mon objectif puis il monte vers l’adret déjà ensoleillé pour disparaître dans la chênaie, sans aucun espoir que mon regard croise à nouveau sa route.
Je suis conscient que je viens de vivre un moment d’éternité d’une vingtaine de secondes et je ne suis pas prêt de l’oublier…
Je me jette sur le boitier pour vérifier la qualité des prises… Vous en jugerez par vous même prochainement!
A demi-rassuré, je peux me diriger maintenant vers les traces qu’il a dû laisser dans la neige gelée.
Je suis impressionné par la taille des empreintes qui épousent la paume de ma main.
Pas de doute, ce sont bien les traces du loup du Ventoux !!
Nicolas Ughetto (
www.nicolas-ughetto.com)www.les-silences-du-ventoux.com (site dédié au 3 ème festival de photos animalières et de nature du 17 au 21 en juillet à Sault, où les photos loups seront exposées)